Covid-19 : la Suède affiche-t-elle un meilleur bilan malgré des restrictions bien moindres ?

Publié le 7 mai 2022 à 17h35
Il est trompeur de prétendre que les Suédois ont traversé la pandémie sans modifier leur mode de vie et leurs habitudes.
Il est trompeur de prétendre que les Suédois ont traversé la pandémie sans modifier leur mode de vie et leurs habitudes. - Source : JONATHAN NACKSTRAND / AFP

Plus de deux ans après le début de l'épidémie de Covid, la Suède affiche une mortalité globale réduite.
Sa stratégie, moins restrictive que dans de nombreux pays, est mise en avant.
L'approche suédoise est néanmoins présentée de manière caricaturale et présente des indicateurs épidémiologiques moins bons que ceux de ses voisins.

Alors qu'au printemps 2020, l'Europe entière fermait ses frontières et imposait de vastes confinements, la Suède faisait figure d'exception dans sa gestion du Covid-19. Une libre circulation maintenue, des mesures plus souples que chez ses voisins... Parfois jugée déraisonnable, cette approche a été vantée en France par les opposants aux politiques mises en place dans l'Hexagone pour contenir l'épidémie. 

Aujourd'hui encore, le président des Patriotes Florian Philippot met en avant la Suède. Cette dernière aurait eu, dit-il, "100% raison", puisqu'elle affiche "l’un des taux de mortalité les plus bas d’Europe". Et l'ancien membre du RN d'affirmer que de tels résultats ont été obtenus "sans jamais confiner, fermer, sans masque, sans Pass". Une analyse biaisée et trompeuse de la situation.

Des citoyens disciplinés

Peut-on dire que la Suède affiche l'un des plus faibles taux de mortalité en Europe ? Pour 100.000 habitants, le pays déplore 186 décès, soit bien moins que la Bulgarie (532), la Croatie (386), la Grèce (281) ou l'Italie (271). La France (226) ou l'Espagne (223) présentent des indicateurs moins bons également, mais l'on peut noter que l'Allemagne (163), la Suisse (158) ou encore les Pays-Bas (133) font mieux. Tout comme le Danemark (107), la Norvège (55), la Finlande (74) ou l'Islande (34), voisins directs de la Suède. 

Ces comparaisons incitent d'autant plus à la prudence dans les analyses que les autres pays scandinaves partagent avec la Suède des caractéristiques communes, que ce soit au niveau du climat, de la densité de population ou des pratiques et habitudes culturelles. Similaires en de nombreux points, tous s'en sont mieux sortis en adoptant des mesures sanitaires plus strictes.

Les parallèles avec les pays voisins ne sont pas les seuls éléments à prendre en considération. En effet, la population suédoise a très largement fait évoluer son mode de vie durant la pandémie, et ce malgré l'absence de mesures coercitives. "Il y a eu un grand abaissement des contacts entre les gens, dans les transports publics de Stockholm, le métro était vide. [...] il est clair que les gens ont respecté les recommandations", a témoigné une journaliste suédoise fin 2020. Les autorités ont en effet incité à réduire les déplacements au maximum, à privilégier autant que possible le télétravail ou à réduire les interactions sociales. 

Contrairement à ce que laisse entendre Florian Philippot, le pays n'a pas laissé se propager le virus sans prendre de mesures. S'il est exact qu'aucun confinement n'a été mis en place, on peut noter que des rassemblements dépassant des seuils précis de personnes ont été successivement interdits, tandis que fermaient les établissements scolaires ou que les ventes d'alcool se voyaient interdites passée une certaine heure le soir. Tardivement, les autorités ont aussi conseillé le port du masque dans les transports, même si la population n'a jamais été très prompte à l'appliquer. L'ancien eurodéputé livre également une information trompeuse en assurant qu'aucun pass sanitaire n'a été instauré en Suède. Ce dernier fut en effet adopté le 1er décembre dernier.

Ces derniers mois, une commission d'enquête s'est penchée sur la gestion de la pandémie lors de deux années écoulées. Si le refus du confinement a été jugé positif, le rapport a toutefois mis en avant une série de bémols. "Nous considérons que davantage de mesures impératives auraient dû être prises en mars 2020 pour limiter la diffusion générale du virus. Si ces mesures avaient été prises, nous pensons que le virus serait moins entré dans des maisons de retraites et qu'il y aurait donc eu moins de morts du Covid-19", a-t-il glissé

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Thomas DESZPOT

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